Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Belleville-sur-Seine

Il a bien fallu se mettre à bosser pour pouvoir être indépendant… Pendant les années de dilletantismes baba, puis la punkitude, j'étais toujours chez mes parents… Liberté totale mais pas d'argent pour faire ce que j'avais envi, m'offrir ce qui me plaisait… et puis j'avais envi d'avoir mon lieu à moi… Aussi je cherchais un emploi de tapissier, renouant ainsi avec mes études à Boulle et la vie "normale"… Je n'avais aucune idée des salaires (et encore maintenant), ne savais le négocier, ni poser mes exigences, le temps que je cherchais du boulot, j'arpentais les rues de paris en long, en large et j'explorais ainsi mon futur territoire… Découvrant avec émerveillement la rue de la Mare (j'y revivait les films de Carné, Renoir et les livres d'Henri Miller) décryptant le vieux Belleville détruit par la promotion immobilière, je cherchais l'histoire sur les vieux murs… La rue des cascades ou sévissaient souterrainement ce qui deviendra la Mano Negra, les Négresses vertes, Métal Urbain… , Pali Kao, les squatts et le Gibus peuplé alors de crêtes et de cuir. Je m'amusait à prendre le contrepied de l'attitude et venir au gibus habillé décalé et bousculer les cuirs les plus brillants, ceux qui affichaient le plus de chaînes et leur prendre la tête en critiquant leur T-shirt Sid Vicious en argumentant que le punk c'etait justement No heros et la fin des idoles… J'étais très provocateur et je n'hésitais pas à braver les dangers avec une certaine inconscience… en même temps d'une timidité extrême, je n'avais pas de petite copine et connaissait peu de gens, échappant ainsi aux côteries tres parisiennes de l'underground de l'époque que je recherchait pourtant en allant aux concerts et en me tenant informé d'absolument tout ce qui se déroulait à cette époque là… Je m'habillais avec recherche et en échappant aux stéréotypes et parfois je cousait moi-même mes vêtements… je dévorais les vitrines des halles, ne pouvant pas m'acheter les derniers avatars des modes rock qui se succédaient à une vitesse hallucinante d'une mode par mois, et j'échangeais un jour des blousons et spencers Krüger® qui me faisaient particulièrement envi contre la tenture murale de son apparte… J'étais au anges je voyais enfin la bande des Halles de l'intérieur… et toujours avec ma distance et ma réserve habituelle… J'écoutais tous les disques importants de l'époque, je savais tout sur tout… je n'avais que cela à faire…
Et puis je trouvais enfin mon premier vrai job… un petit magasin de meubles, rue des Pyrénnées, je fut embauché par le patron haut en couleurs, une juif algerois, malin et rusé qui me paya extrêmement mal… mais je ne savais pas parler d'argent et j'étais tellement content que l'on me prenne…Z.i passait son temps à rouler les clients, et s'amusait de tout, on voyait défiler ses maîtresses et les clients mécontents, il descendait parfois en catastrophe au sous sol ou nous travaillions, et s'enfuyait par la porte de la cave, et revenait des l'alerte passée… Avec alain, Issa nous faisions chaises et têtes de lit Louis XVI et louis XV à la chaine, les vernissions de A à Z, montions des placards, et les livrions aux clients… là le temps ou nous étions dans la camionette, je me balladais, je decouvrai le monde avec des yeux grands ouverts… parfois quelques pourboires, lorsque nous installions des rideaux, des tentures murales… Z.i était le premier juif que je rencontrais, il m'était mystérieux et folklorique, je ne comprenais rien à son monde, à son franc-parler coloré et souvent vulgaire, il me choquait par les quolibets qu'il adressait à chacun, nommant les gens avec des noms à la Haddock… Ignorant des couûmes d'Afrique du nord, je trouvais son goût tres kitch et cheap… Mais ses clients avaient la même origine et le même gout pour le paraître, le tape-à-l'œil… Moi qui ne pensait qu'Avant-garde et Art, j'étais en terre inconnue… Z.i avait un copain qui tenait un magasin fabrique de vêtements en peaux sur la petite place à côté, il y récupérait les déchets pour garnir les sommier sur lequel il nous fit apposer des étiquettes Epeda… quelques mois plus tard… la réaction ne se fit pas attendre… des vers dévoraient les peaux des sommiers et les clients furieux arrivaient… re-ouverture des portes de la cave… Issa lui est Ivoirien, et nous nous entendons très bien, et nous passons les journées à discuter de tout et de rien… et Alain le chef d'atelier vit lui sur la nostalgie de sa jeunesse minos passée a danser en discotheque sur la soul et le rythm n' Blues… l'apprenti lui venait de la banlieue et avait des liens de parentés avec Mesrine qui à l'époque fit beaucoup parler de lui… un petit gars extremement gentil typique de la banlieue Montreuilloise… Nous ouvrions le magasin en rengeant les lourdes grilles apposées sur les vitrines, descendions l'étroit escalier jusqu'à le poussiereux sous-sol et chacun prenait sa place… là nous attendaient les carcasses de sièges… les journées me paraissaient longues, lorsqu'il n'y avait pas de livraisons… Souvent dans Menilmontant ou Belleville… Les clients avaient tous le même genre d'intérieur… souvent Louis XVI pas le style historique celui du sentier.Rarement j'étais épaté par le gout de ces personnes là… je rêvais de faire autre chose, le dessin, la peinture… et je me disait que plus tard…
Tout ceci me paya mon premier studio… minuscule; derrière Jourdain à deux pas de mon boulot… Avec les chutes de Krüger je retapissais de rose cette chambrette… une petite cuisine et une petite salle de bain… Qu'importe j'étais à paris, j'avais du mal à joindre les deux bouts avec mes 800 francs de loyer, mais j'étais à paris… assez seul malgré mes amis de champigny Jacques et Barbara qui s'était installés en couple du côté Ménilmontant. Et ma vie parisienne débutait.

Commentaires

  • j'allais à la java et au tango, je connais le fameux Kruger :)

  • J'aime beaucoup les notes de souvenirs, et celle-ci est particulièrement bien contée :)

  • C'est toujours un plaisir de suivre tes mots ...
    Quand ils parlent à la première personne encore plus...

  • Serie : le tangpo… j'avais oublié ! son atmosphere enfumée… le Gibus, le Rose Bonbon… les premieres nuits d'actuel… le Globo, les 120 nuits…
    Tina and Cie : merci…

  • Je te "conseille" de réécrire tous tes souvenirs, avec tous les détails dont tu te souviens, les noms que tu pourrais changer, les couleurs, les odeurs qui te reviennent à l'esprit!

    J'imagine un roman parisien qui se déroulerait dans les annéees révolues et qui serait lu par ceux qui ont vécu cette période à Paris aussi, et les autres...

    Tu as du bon matériel et bien sûr c'est sympa de te lire sur le blog mais je pense que c'est un peu gâché si ça en reste là!!!...

    (Allez, au boulot yoyo!!!)

    mm

  • Je soutiens mm : au boulot Yoyo....!!!! hihii + bisous...

  • Bonjour,
    J'aime venir lire tes histoires...
    Bon dimanche.

  • on a dû se croiser....
    j'avais un petit spencer krüger que j'adorais.... noir avec des pressions.... et une petite robe noire alïa avec des pinces argentées sur les côtés, en haut des épaules!
    et j'habitais à gambetta;
    alors.... je les aime bien, ces fantômes.

  • AH les soirées à la java, au tango! aïe aïe, que d'eau que d'eau....

Les commentaires sont fermés.