J. vivait chez les Gardes Mobiles… On se croisait souvent mais on ne se parlait pas. Son frère était le copain de mon neveux. Son père était Garde mobile aussi ne voyait 'il pas d'un très bon œil l'originalité de son fils. En pleine punkitude j'arborai des vêtements déchirés, rapiécé d'épingles à nourrices, la joue elle-même plantée d'une épingle… et le cheveux broussailleux. Jacques était le seul punk que je voyais à Champigny à cette époque. Je me souviens que les voyoux de l'époque nous arrêttaient en nous demandant ce qu'on était car ils n'arrivaient pas à nous cataloguer, ni rockers, ni baba…
La première fois que je parlais à J, il avait les yeux rouges et les cheveux assortis, il fumait et ses yeux en patissait… Sous la pression familiale, il s'était engagé dans l'armée et avait fini par réussir àse faire réformer après quelques années… Nous ne bossions pas et trainions beaucoup…
On sympathisa immediatement et il me prêta un livre sur la Fraction Armée Rouge… le punk avait récupéré l'iconographie politique, mais pour moi c'était surtout l'esthétique qui m'intéressait… si j'avais des sympathies pour l'extrême gauche de la France Giscardienne, je n'adhérais pas à l'action armée. Jacques lui s'y interessait et n'était pas loin de passer à l'acte.
Son père un jour le vis en photo sur une couve de VSD. A cette époque les casseurs étaient ou manipulés par la police, ou plus ou moins "spontex", cette photo le montrait en train de lancer une chaise sur une voitrine du Café de la Paix. Moi j'étais beaucoup plus attiré par la version surrélaiste et dadaiste du punk. Je passais mon temps a arpenter le supermarché du coin et a y placer des fausses pubs réalisées à la main (pas d'ordi à cette époque) Rayon Alcool : Une pub pour l'apéritif Suze ou une femme faisait une fellation à une bouteille se Suze… au rayon livres, des jaquettes placées sur les couvertures du livre de Giscard "Démocratie Française" : Grand prix de l'humour noir"… Je bombais les rues des mots tels que "bonheur" Je trainais aussi les poches remplies de serpents et grenouilles, faisant semblant de voler pour me faire attrapper par le vigile qui evidemment me demandait de vider mes poches… Plus c'était absurde plus mes actions me plaisait. j'entrainait J. dans ces délires là. Jacques intégra un groupe de rock et moi ne sachant pas jouer, je trainais à côté… Il eu Desireless un temps comme chanteuse de son groupe. On traina beaucoup ensemble… Jacques a beaucoup de charme et il plaisait… Lui et B s'installèrent ensembles, B. était l'amie de ma charmante petite copine, et on faisait une petite bande sympa… On avait pas de fric, mais on s'amusait beaucoup…
On apportait parfois à manger à J. et B. qui n'ayant pas de boulot, n'avaient non plus pas grand chose à manger… parfois un peu de nourriture pour chat (pour les protéines) beaucoup de pâtes) Un vrai rocker se joint à notre bande, mais il craignait bien et un jour on eu droit a un siège de sa bande de blouson noirs… Un soir de délire avec des amphétamines, on pris la tête d'une de nos amis en parlant toute la nuit frénétiquement (moi d'une association d'idée à l'autre personne n'arrivait à nous suivre…)…
Moi j'aimais bien l'expérience qui s'arrêtta là, J. persévéra… et un matin je le trouvais la moitié du crâne rasé, il avait l'air de sortir tout droit d'HP. Alors on se mit à traîner au supermarché en mimant des débiles profonds, pratiquement en bavant…
B eue un moment à supporter deux énergumènes qui passait tout leur temps à se comporter comme des débiles profonds… notre marche était claudiquante et nos propos décousus à la manière de trisomiques…
Cela nous amusait beaucoup… sans compter mes multiples provocations, je n'avais peur de rien… Jacques parfois m'accompagnait dans ces délires, je me souviens d'avoir arpenté avec lui les rues de Saint-Michel, ligotté et baillonné, sans que nul s'étonne et s'interpose…
Nous formions une petite bande avec un autre couple d'amis qui avaient une adorable petite fille, On se voyaient beaucoup, Eux étaient d'anciens zonards… Leur vie était difficile. Nos "copains" rockers les cambriolait régulièrement…
C. était orphelin. Il partit faire un stage afin d'apprendre un vrai métier. A son retour nous étions tous installés à Paris du côté Menilmontant-Belleville, je l'hébergeait dans mon minuscule studio de la rue de la Villette… J'avais une nouvelle petite copine, par discrétion, il pris une chambre d'hôtel à proximité, juste face au Père Lachaise.
Il avait le double de mes clés, mais ne les utilisait pas. Sans nouvelles je passait le voir et le trouva pendu à 1m du sol, tenu a une fenêtre par une cravate. Je prévins sa copine, il laissa une adorable petite fille seule avec une mère dépressive que je revis par hasard quelques années plus tard et qui ne s'en était pas sortie et pour laquelle je ne pouvais rien. Ce fut le premier et hélas pas le dernier de mes copains que je perdis. Lorsque je vis un truc sympa, je regrette toujours d ene plus pouvoir le partager avec lui…
Je travaillais alors comme tapissier décorateur, et je voulais m'en sortir… J. integra une banque, le weekend il jouait avec son groupe, je me cherchais, étais assez pénible et lui et B. me supportaient avec une grande patience. Je voulais changer de vie et aller plus vers l'art, vers la peinture ou le dessin, je me sentais pas à continuer à être tapissier dans un milieu ou on ne voulait pas entendre parler de création. Sans dipômes je m'inscrit à la fac, et contre toute attente, après un entretien de motivation, et un dossier bancal, on m'accepta, j'entrai en Fac d'arts plastique. J'étais heureux d'être étudiant, même si la journée je travaillais dur. Le soir j'allais à la fac, les cours me plaisaient beaucoup et je me fis amis d'une bande de filles drôles et gentilels aves lesquelles je m'entendait très bien… ma nouvelle vie débutait.
Commentaires
Je te remercie pour ton com! :o)
A bientot
Deborah
ça a dû être très fort comme expériences...
tu t'en souviens comme si c'était hier, tu nous les "offre" un peu pour les oublier?...
:-)
Ecrire pour oublier, évacuer ???
Courage...
nan juste pour le plaisir de raconter…
Raconter et ainsi faire revivre quelqu'un que tu aimais beaucoup...
C'est beau.
Bises et bon dimanche !
un côté de ton histoire qui me rappelle certains évènements de mes années 68 !
faire les idiots dans la rue, puis découvrir le film à lars, et se dire qu'on est pas tout seul, comme quand je te lis, on est pas tout seul, à chercher, à se laisser prendre, à ne pas marcher dans le sang du rang rassis.
amitiés
Bien ce récit. Mon mari a eu aussi un copain d'adolescence qui s'est suicidé. On ne l'a su que par un copain commun qui est décédé depuis d'un cancer... la vie quoi.
Bonne journée.
C'est bon de te lire... Oui, il y avait du malheur parfois mais noyé sous des tonnes d'inscouciance, d'énergie, de jeunesse et de révolte. Il y avait de la tristesse aussi quand je prenais de l'acide et qu'il fallait redescendre et faire le ménage dans ma vie sentimentale qui baignait dans trop de certitudes hésitantes pour pouvoir déborder de l'instant présent. Les émotions incontrôlées balayaient la route devant nous, juste pour nous éviter de marcher trop droit. Il y avait la dérision et la provocation dans notre numéro au salon de la BD où habillé en grand manteau de cuir noir je te trimballais/malmenais attaché parmi les rayons sous l'oeil interloqué des passants. Il y avait de la gratuité harmonieuse dans nos actions, animées par une propagande sortie tout droit de nulle part si ce n'est d'un désir irrépressible d'exister et ainsi faire écho avec nos lectures et nos musiques qui allaient de Bakounine à Patti Smith, de Max Steiner à Bonzo Buddha Band et dans ces balances improbables nous étions toujours amusés du résultat qu'il en sortait... Je suis toujours là... Ton pote Jacques
moi aussi je suis toujours là jacques, et je ne regrette riend e ces errances qui étaient necessaires, sans doute pleines de desespoir, mais aussi d'espoir et de rage de vivre… et cette rage de vivre nous l'avons toujours au fon de nous et nous essayons de la transmettre et de la communiquer aux autres… je suis toujours là et toujours fidele aux idéaux de notre jeunesse… et tu voit le temps passe et on est toujours pote et sans doute plus encore maintenant…